Sceneario.com : Bonjour Mathieu. Peux tu nous faire une présentation sommaire de Mathieu Gabella avant son entrée dans le monde de la Bande Dessinée ? Et pour quoi, t’es tu lancé la dedans ?
Matthieu Gabella : Avant mon entrée dans le monde de la BD, je faisais des études d’ingénieur. Ce métier m’intéressait pour le côté scientifique, mais aussi créatif : je voulais bosser en bureau d’études, ou en recherche et développement. Les aperçus que j’ai eus de l’industrie au cours de mes quelques stages m’ont un peu effrayé… Or, un camarade qui dessinait me proposait au même moment de lui écrire un scénario de bd. C’était la Chute, avec cet ami, Poulos, et c’est comme ça, chez Petit-à-petit, que ça a démarré…
Sceneario.com : Parlons de ton actu avec la sortie en ce mois de février 2008 de La Licorne 2. Comment est venu l’idée de ce projet ? Tes sources d’inspirations ?
Matthieu Gabella : Grâce à mon père, qui est médecin. Il m’a traîné très tôt dans un musée d’histoire de la médecine, à Rouen, régulièrement. Par la suite, je repensais souvent à ce thème. Il me plaisait pour son intérêt historique et scientifique, mais aussi pour son aspect visuel très fort : instruments médicaux, pratiques médicales souvent impressionnantes et douloureuses, illustrées par des gravures et des peintures dont le style rendait ces interventions et ces techniques plus morbides encore…
Sceneario.com : Pourquoi avoir choisi cette époque ? Et Ambroise Paré comme personnage principal ? Pourquoi ce mélange de l’ Histoire, de fantastique avec ce bestiaire fantastique illustré d’une façon différente par Anthony Jean ?
Matthieu Gabella : La période la plus intéressante pour traiter ce thème était la Renaissance : c’est pendant cette période que l’ancien dogme médical a été le plus durement remis en cause, et qu’il y a eu de vraies figures héroïques dans ce domaine, comme Paré, ou Vésale !
Il y avait matière à faire une très bonne histoire, mais surtout pour la BD, grâce à ce visuel ! En parallèle, j’ai eu très tôt une attirance pour la tapisserie de la Licorne, et l’envie de broder une histoire autour. Une histoire qui parlerait du bestiaire médiéval, notamment de la Licorne, que je ne voyais pas beaucoup en bd…
J’adore le mélange historique et fantastique en tant que lecteur, donc, logiquement, en tant qu’auteur. Les médecins célèbres ne sont pas des personnages qu’on a l’habitude voir dans des bds, ou des romans, c’était d’autant plus intéressant de les mettre en scène, même si Nostredame est connu. Mais pas en tant que médecin !
Pour ce qui est du bestiaire médiéval fantastique, et de la tapisserie de la Licorne, j’étais fasciné par ces éléments depuis un bout de temps.
En cherchant à quoi pourrait ressembler la dimension fantastique de cette histoire de médecins, j’ai vu des liens se dessiner avec la Licorne. D’abord, les propriétés thérapeutiques controversées de la Corne de Licorne (qui était une dent de Narval, en fait) ont vu naître une polémique à laquelle Paré a participé : il disait que c’était une arnaque d’apothicaire. Il y a aussi un lien thématique : la Renaissance, c’est le renouveau de l’Art, et de la Science, c’est aussi la mort des anciennes croyances. On croyait à l’existence de la Licorne parce que le monde n’était pas encore connu, mais, en découvrant peu à peu de nouveaux territoires, à commencer par l’Amérique en 1492, on s’est aperçu qu’elle n’existait pas.
Sceneario.com : Comment as-tu rencontré d’ailleurs ton dessinateur ?
Matthieu Gabella : Par le biais de Delcourt ! J’avais proposé le scénario de la Licorne, ils avaient accroché, ils m’ont mis en contact avec Anthony !
Sceneario.com : Comment travaillez vous ? Jean peut il intervenir sur le scénario ou toi sur son dessin ?
Matthieu Gabella : S’il a des envies, ou des idées, je lui demande, évidemment, avant l’écriture du scénario. Après, j’écris dans mon coin, et je lui demande son avis sur le premier jet de découpage. Pour l’instant, c’est passé à chaque fois, quelques questions se sont posées mais elles se sont facilement résolues. Le gros de la collaboration se fait au découpage : je fais quelque chose d’assez précis, pour être sûr que mes informations passent de manière fluide, dans les 46 pages imparties, mais après, Anthony peut remanier à sa guise. Tout ce que je veux, c’est comprendre, et retrouver les informations, actions, et émotions que je voulais faire passer. C’est sur le storyboard que je fais le gros de mes remarques. Je n’interviens pas sur le dessin fini, ou simplement pour dire « ça, je trouve ça un peu bizarre, attention à ne pas le refaire » mais franchement, pour avoir des trucs à redire sur le dessin d’Anthony… il faut se lever tôt !
Sceneario.com : La licorne est prévu pour être une longue série ou juste un cycle complet ? Connais tu déjà la fin ?
Matthieu Gabella : C’était prévu en trois tomes, mais en découpant le deuxième tome (avant la sortie, et le succès du premier tome, je tiens à le dire), je me suis aperçu que ça ne tiendrait pas. Donc, c’est prévu en 4 tomes, et je connais la fin, même si j’ai un peu de marge de manœuvre. Je me laisse la possibilité d’avoir des idées.
Interview tiré de Sceneario.com, merci a eux